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Comment les industriels décarbonent leurs offres
Pierre-Etienne Bindschedler (Soprema), Lucas Weiss (Voltec Solar) et Stéphane Marcinak (Sauter Régulation) vous expliquent pourquoi et comment ils souhaitent engager leurs entreprises sur une voie de décarbonation. Des témoignages inspirants qui peuvent montrer la voie vers une croissance verte !
I- Pierre-Etienne Bindschedler, PDG de Soprema, spécialiste de l'étanchéité, de la végétalisation et de l'isolation
La problématique
Ce premier intervenant de la Tribune des décideurs évoque en ouverture la nécessité de travailler sur la partie énergétique pour décarboner les activités de son entreprise – et la société de façon plus générale, « mais ce sont les matières premières qui sont les sujets les plus impactants en poids carbone ». On comprend donc que pour Pierre-Etienne Bindschendler, la question des matériaux est centrale, à l’aune notamment d’une demande qui explose dans le secteur du BTP. Aussi, décarboner les isolants thermiques représente donc pour ce gérant d’entreprise non seulement un travail immense, mais aussi une priorité à ce jour.
Quelles solutions ?
« Ce qui va faire la différence, c’est notre capacité à produire des isolants qui ne sont pas trop carbonés au départ. »
Pierre-Etienne Bindschedler l’affirme, Soprema est « chanceuse » car son travail sur le sujet de la décarbonation des matériaux date d’il y a déjà plus d’une dizaine d’années (dès 2008-2009), notamment sur l’éco-sourçage des matières premières. Soprema l’avait déjà compris à cette époque, « nous avons un gisement extraordinaire, et ce sont les produits qui sont déjà sur le marché », c’est-à-dire qui ont déjà eu une première vie.
Outre la conception du produit au départ, une autre source majeure de décarbonation réside dans la gestion de la fin de vie des matériaux et leur recyclage, qui doit être le plus facilité possible : « un vrai challenge auquel sont soumises toutes les entreprises ». En somme, il faut travailler sur la façon dont les produits sont conçus, puis sur comment ils sont utilisés, et enfin comment ils sont réutilisés. Aujourd’hui chez Soprema, les matériaux recyclés représentent déjà 15% des matières premières employées, mais il s’agit bien sûr d’aller encore plus loin, avec pour objectif d’atteindre une part d’environ 25% d’ici à deux ans. « La circularité des produits est une notion très intéressante ».
Par ailleurs, depuis le 17 octobre 2022, l’entreprise fait apparaître l’empreinte carbone des commandes de ses clients sur ses factures : lorsque cela est possible, le poids carbone de chaque produit unitaire et de son transport est indiqué. Pierre-Etienne Bindschendler appelle cela la « facture CO2 ». Un système encore perfectible, mais qui contribue à aller vers plus de sobriété, mais aussi vers une sensibilisation des acteurs en interne notamment.
Enfin, l’une des solutions de choix pour décarboner réside bien entendu dans l’emploi d’isolants biosourcés. Pierre-Etienne Bindschedler donne pour exemples la fibre de bois, qui protège l’hiver et procure un excellent confort d’été, ou encore la ouate de cellulose formée à base de papier recyclé.
Et de conclure : « ce travail que l’on doit faire sur le CO2, c’est passionnant et novateur. Quelle que soit l’amélioration à atteindre, il faut le faire avec beaucoup d’enthousiasme et d’énergie ».
II- Lucas Weiss, Directeur Général de Voltec Solar, fabricant français de modules photovoltaïques
La problématique
Dans son intervention, Lucas Weiss explique que le solaire est une technologie qui est mise sur le devant de la scène depuis peu, notamment à la suite de l’explosion des prix des ressources fossiles face à laquelle elle représente une alternative intéressante. Pour ce nouveau décideur interviewé, il s’agit même aujourd’hui « d’un des principaux leviers de la transition énergétique ». Il s’agit aussi selon lui de la solution « la moins chère, la plus résiliente, la plus rapide à mettre en œuvre et qui génère le moins d’impact sur l’environnement ».
Par ailleurs, plusieurs nouvelles réglementations se montrent en faveur du développement de l’énergie – on pense notamment à la loi sur les énergies renouvelables récemment adoptée par le gouvernement –, mais malheureusement pas forcément, au regret de Lucas Weiss, en faveur de l’industrie solaire française. Selon lui, cette dernière doit pourtant être poussée en premier lieu pour retrouver la souveraineté énergétique dont tout le monde parle en ce moment. Enfin, une autre difficulté demeure : une tension sur la matière première avec l’approvisionnement difficile en silicium, ressource qui se fait rare et peine à répondre au besoin du marché.
Quelles solutions ?
En tant que premier fabricant d’équipement fonctionnant à l’énergie solaire en France, la stratégie de Voltec Solar est d’aller dans une démarche d’éco-conception et de circularité – notamment par le biais de partenariats liés avec des fournisseurs bas carbone, mais aussi via le travail direct avec des usines de recyclages de panneaux solaires (« l’un des plus gros levier que nous avons identifié », avec une filière structurée en France via notamment les éco-organismes, « sans commune mesure avec ce qu’il se fait dans le reste du monde ») –, maximiser l’usage des sols et avoir un impact le plus neutre possible sur l’environnement. Une politique qui dénote dans un contexte global où, selon Lucas Weiss, l’industrie du solaire se dirige vers une voie plutôt carbonée.
III- Stéphane Marcinak, président de SAUTER régulation France, spécialisé dans la gestion et l’optimisation des énergies et fluides dans le BTP
La problématique
Le groupe SAUTER est un groupe Suisse qui représente 3 300 collaborateurs avec un volume d’activités de 500 millions d’euros : il se doit donc d’appliquer à lui-même le principes de respect de l’environnement qu’il défend.
Pour son intervention dans la Tribune des décideurs, Stéphane Marcinak insiste en premier lieu sur le contexte réglementaire – notamment avec le décret tertiaire –, selon lui enfin favorable à la bonne compréhension des utilisateurs finaux de l’intérêt de l’immotique pour la préservation de l’environnement. Ainsi, sur les solutions proposées par SAUTER régulation France, on apprend qu’en réalité, elles sont proposées depuis longtemps au grand public, mais qu’elles ne sont réellement intégrées et acceptées que depuis peu de temps. Le contexte sanitaire et la hausse des coûts de l’énergie ont également permis de faire comprendre aux clients l’intérêt de prendre la main à distance sur des installations pour faire un premier diagnostic ou bilan, tandis qu’auparavant, des collaborateurs étaient automatiquement envoyés sur site.
Quelles solutions ?
Une fois cette bonne compréhension acquise, le groupe SAUTER peut désormais investir sur de nouvelles innovations telles que la digitalisation complète de ses solutions. « Aujourd’hui, nous pouvons dire que 60% du groupe a mis en place une politique RSE qui s’applique à l’ensemble des entreprises ». Dans chaque filiale du groupe est opéré un suivi des performances énergétiques, avec la mise en place d’un accompagnement de la part de la société EcoVadis.
Plusieurs pistes d’amélioration résident tout de même dans la montée en compétence sur la digitalisation et dans la sensibilisation des donneurs d’ordre sur l’éthique des bâtiments connectés (notamment concernant la gestion des données).
IV- Christine Muscat, Directrice Générale de Knauf France, spécialiste des solutions d'isolation thermique, phonique et pour l'aménagement intérieur
La problématique
Il existe un double enjeu pour Christine Muscat aujourd’hui : la décarbonation, la construction du bâtiment et la sobriété des matériaux.
Pour le premier point, Knauf cherche donc en premier lieu « à décarboner la matière » en « offrant des solutions qui permettent une construction plus légère » et des « solutions moins carbonées et moins consommatrices d’eau », ce qui permet de faire des économies de ressources.
Sur la sobriété des matériaux, Christine Muscat appelle à ne pas surenchérir sur l’utilisation d’isolant : « la meilleure ressource est celle que nous n’engageons pas ».
Quelles solutions ?
Sur la construction sèche, Knauf a notamment lancé une plaque de plâtre allégée avec 25% de plâtre en moins, une première sur le marché français. L’entreprise spécialisée dans l’isolation thermique cherche également à employer massivement les énergies renouvelables, et principalement la biomasse, pour développer ses activités et ses produits au quotidien.
Enfin, les isolants biosourcés et/ou issus du recyclage sont eux aussi évidemment sur le devant de la scène pour l’entreprise. L’un des isolants employés par Knauf est notamment le NEXTherm®, produit à base de bio-naphta et de bio-gaz, dont l’empreinte carbone est divisée par quatre comparé à un isolant classique. Sur le recyclage, les déchets de chantiers sont collectés par l’entreprise et ramenés en usine, notamment sur les isolants en polystyrène : la démarche s’appelle Knauf Circular® et a été initiée il a maintenant plus de 3 ans.
Toutes ces pistes sont prometteuses et doivent être déployées conjointement : « il faut avoir tous les sens en éveil et exploiter toutes les opportunités » d’opérer la transition.
Christine Muscat conclut son intervention en précisant qu’ « il faut apprendre à faire différemment et sortir des sentiers battus et rebattus », tout en étant porté par une réglementation ambitieuse et un objectif de rénovation énergétique d’envergure en France.
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